Andrey Rublev, l’âme à vif et le bras chargé d’explosif
Quand il s’avance sur un court, on dirait un gamin qu’on a réveillé trop tôt. Les traits tirés, les cheveux en bataille, et ce regard… Ce regard de chien battu, toujours au bord du trop-plein, jamais vraiment calmé. Mais dès que la balle fuse, Andrey Rublev, c’est l’orage qui craque. Un uppercut à la ligne, un cri à la lune, et tout le monde comprend que le Russe n’est pas venu pour distribuer des câlins.
À Toronto, il n’a pas juste remporté un match. Il a envoyé un message, un de ceux qui traversent l’Atlantique en moins de deux secondes. Gaston en a fait les frais, Sonego est prévenu, et les autres feraient bien de lever la tête entre deux échauffements. Rublev est en mode animal blessé, et dans ce genre de période, il mord plus qu’il ne pleure.
Marat dans la ligne de mire
En coulisses, un autre nom circule dans les vestiaires : Marat Safin. Le mentor fantôme, l’ombre russe qui plane au-dessus de Rublev depuis quelque temps. L’ancien numéro un mondial pourrait débarquer à New York, comme un tonton un peu rock’n’roll qu’on n’a pas vu depuis un moment, mais qui ramène toujours de bonnes histoires.
« Il est possible que Marat soit avec moi à New York. Le seul souci, c’est de savoir s’il a fait son visa à temps. » La phrase est lâchée comme une confidence, presque gênée, en plateau. Mais elle pèse lourd. Parce que Rublev, malgré ses 26 ans, cherche encore un phare. Un guide. Et qui de mieux que Safin, lui aussi génie instable, gueule charismatique, joueur maudit et glorieux à la fois ?
S’il débarque à Flushing Meadows, ce ne sera pas pour faire du tourisme. Ce sera pour canaliser le volcan Rublev, pour lui apprendre à survivre dans un tournoi qui demande autre chose que des missiles en coup droit et des soupirs vers le ciel.
Un gars qui transpire l’honnêteté
Rublev, c’est l’anti-star. Il n’a pas le swag d’un Kyrgios, le flegme d’un Zverev ou la grâce d’un Alcaraz. Il a autre chose. Un truc brut, désarmant. Quand il parle, il bafouille parfois, mais tu sens que rien n’est calculé. Quand il perd, il s’insulte, se tape la jambe, se détruit à voix haute. Et quand il gagne, il s’excuse presque.
C’est ce mélange-là qui fascine. Ce contraste entre la rage de vaincre et la tendresse maladroite. Il n’a pas la carapace des autres. Il joue sans filtre. Et ça, dans un circuit aseptisé, ça claque.

Toronto n’est qu’une station
Sa victoire contre Gaston ? Une formalité. Une masterclass clinique et violente, en deux sets. Un rappel que quand Rublev est dans le bon mood, il peut tabasser n’importe qui. Mais le vrai test, c’est à New York. C’est là qu’on l’attend. Sur le central, sous les projecteurs, avec des tribunes pleines et les nerfs à vif.
Avec ou sans Safin à ses côtés, il va falloir transformer la foudre en or. Parce que depuis ses débuts, Rublev court après quelque chose. Un gros titre. Une ligne en gras sur Wikipédia. Un instant d’éternité.
Il a le jeu. Il a le cœur. Il a la douleur. Il ne manque plus que la lumière.
Crédit photo : Getty Images
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